La zone de rencontre : un aménagement encore bien mal connu, y compris des élus aurillacois.

La zone de rencontre est définie en france par l'art R.110-2 du Code de la Route :

section ou ensemble de sections de voies en agglomération constituant une zone affectée à la circulation de tous les usagers. Dans cette zone, les piétons sont autorisés à circuler sur la chaussée sans y stationner et bénéficient de la priorité sur les véhicules. La vitesse des véhicules y est limitée à 20 km/h. Toutes les chaussées sont à double sens pour les cyclistes, sauf dispositions différentes prises par l'autorité investie du pouvoir de police. Les entrées et sorties de cette zone sont annoncées par une signalisation et l'ensemble de la zone est aménagé de façon cohérente avec la limitation de vitesse applicable.

Etant donné ce qui est constaté sur le terrain en centre ville d'Aurillac, il apparait nécessaire de reprendre chaque point de cet article réglementaire.

Zone affectée à la circulation de tous les usagers : les commerçants peuvent être rassurés, moins restrictive qu'une aire piétonne, il est toujours possible pour les clients de venir en voiture dans cette zone. Il n'y a pas de limite au trafic : la place de Bienne en Suisse voit passer 10 à 12000 véhicules par jour et nombreuses sont les places devant les gares traitées en zone de rencontre chez nos voisins. Aurillac aurait bien fait de s'en inspirer pour sa place de la gare : les piétons traversant la place sont toujours camouflés derrière les véhicules en stationnement, la vitesse est théoriquement limitée à 50 km/h, ce qui laisse environ 20 % de chance de survie à un piéton percuté, contre 95 % de chance si la vitesse était limitée à 20 km/h. La mise en place du refuge ou îlot central augmente la sécurité des piétons mais réduit celle des cyclistes. En effet, il est fréquent qu'un véhicule commence à dépasser un cycliste puis se rabatte brutalement pour éviter l'îlot central. C'est d'autant plus fréquent avec un poids lourds qui sous estime la vitesse du cycliste et la longueur de son véhicule.

La zone de rencontre : un aménagement encore bien mal connu, y compris des élus aurillacois.

Les piétons sont autorisés à circuler sur la chaussée sans y stationner et bénéficient de la priorité sur les véhicules : les piétons sont prioritaires sur tous les véhicules, y compris les vélos et peuvent circuler librement sur la chaussée sans toutefois entraver inutilement la circulation en y stationnant. Pour que cette affirmation soit effective et bien comprise à la fois des piétons et des conducteurs de véhicules, il est impératif de ne pas trop marquer de séparation sur la chaussée : une différence de couleur suffit, avec une ligne de pavés pour les déficients visuels.

En Belgique, le Code du gestionnaire de la voirie stipule : "la voie ne doit pas être divisée en chaussée et trottoir." Les belges sont pleins de bon sens : si les trottoirs sont présents, les piétons s'y cantonnent, les véhicules sont les rois sur la chaussée et la vitesse n'est pas respectée.

Sur cette photo, rue JB Champeil, pas de trottoir mais une chaîne qui indique clairement au piéton qu'il n'a rien à faire sur la chaussée et à l'automobiliste que la voie lui est réservée. On est pourtant en zone de rencontre. Evidente contradiction et confusion dans l'esprit des élus et services techniques.

La zone de rencontre : un aménagement encore bien mal connu, y compris des élus aurillacois.

Alors que dire de la rue Arsène Vermenouze. Il n'a pas fallu longtemps aux bénévoles de l'association qui viennent d'y déménager leur atelier vélo dans un local mis à disposition par la mairie pour s'apercevoir que de "rencontre", cette zone n'a que le nom.

C'est l'occasion de détailler un autre point de l'article cité plus haut :

L'ensemble de la zone est aménagé de façon cohérente avec la limitation de vitesse applicable : au vu de la photo, on se demande bien quel aménagement rend la limitation de vitesse cohérente !

Il est assez instructif d'y observer le comportement des piétons qui rasent les murs en essayant tant bien que mal de rester sur les trottoirs très étroits souvent encombrés d'ordures, y compris en ce dimanche de Pâques. Exercice plus que périlleux pour les personnes à mobilité réduite dont les droits sont clairement bafoués. Pas étonnant que les commerces soient fermés.

D'ailleurs une personne habitant la rue s'est récemment plainte au service cadre de Vie de différents désagréments de cette rue. Ce qui est intéressant, c'est qu'un élu lui a répondu par écrit et la réponse vaut son pesant d'or.

La zone de rencontre : un aménagement encore bien mal connu, y compris des élus aurillacois.

Le plus étonnant dans cette réponse est que ni l'habitante de la rue, ni l'élu ne savent que la limitation de vitesse dans la rue Vermenouze est de 20 km/h, comme indiquée sur le panneau B52 qui marque l'entrée de la zone de rencontre (voir 1ère photo de l'article). Comme il est probable que les relevés de vitesse lui aient été fournis par les services techniques ou pire, par les services de police municipale, on comprend mieux le titre de cet article !

Après, certains pourront s'étonner qu'on tolère une proportion de 11% de véhicules roulant au-dessus de la limitation. En fait, si la rue était à 30 km/h, ce serait tout à fait acceptable, même aux yeux de nos voisins suisses ou belges qui tolèrent une V85 (vitesse en dessous de laquelle roulent 85 % des véhicules) jusqu'à 35 km/h. Par contre, dans l'année qui suit la mise en place d'une nouvelle zone de circulation apaisée, un contrôle de la vitesse y est obligatoire et si une vitesse supérieure est constatée, la loi suisse oblige les concepteurs à revoir leur copie et à créer des aménagements pour réduire la vitesse. En France, on préfère pondre une loi obligeant la création d'aménagements cohérents avec la limitation de vitesse mais sans les définir et surtout sans contrainte, sauf pour les utilisateurs qui collectionnent les PV !

Alors que faire dans la rue Vermenouze ?

Les mauvaises solutions :

- faire travailler la police et distribuer les PV : c'est provisoirement efficace mais contre productif. La mairie va crouler sous les courriers incendiaires d'automobilistes furieux et l'exercice de la démocratie est tel que la rue Vermenouze sera déclassée en zone 30. C'est du vécu, rue de l'Egalité ou boulevard Eugène Lintilhac qui ont vu leur limitation à 30 se muer en 50.

- mettre la rue Vermenouze en zone 30 : c'est le plus simple mais ça rendrait incohérentes les limitations de vitesse dans le centre ville historique, tout le reste étant zone de rencontre ou aire piétonne. Et puis, ça ne résout en rien la sécurité des piétons sans parler de l'agrément qu'ils peuvent trouver à y circuler.

La bonne solution :

- réaménager la rue de façon conforme au Code de la Route et multiples documents du Certu : supprimer les trottoirs comme dans la plupart des rues du centre ville augmenterait la cohérence de la zone, permettrait de se conformer aux droits des personnes à mobilité réduite, permettrait une certaine mixité dans l'usage de la chaussée et donc une réduction de la vitesse, comme dans la rue des Frères Delmas ou la rue du Monastère. Cette réduction de la vitesse serait aussi obtenue en aménageant quelques places de stationnement de façon alternée, rendues possibles par l'absence de trottoir. La largeur de la rue le permet en partie basse.

Si les piétons peuvent circuler de façon plus sécurisée dans cette rue, on peut espérer que la courbe du nombre de fermetures de commerces s'inversera, pour paraphraser quelqu'un de bien connu.

Oui mais ça va encore réduire l'accessibilité du centre ville ! Non, le débit ne sera aucunement limité par une réduction de 10 km/h de la vitesse des véhicules. Au delà du cas extrême de la place de Bienne citée plus haut, nombreuses sont les rues en zone de rencontre qui acceptent 5000 à 6000 véhicules / j. Si nos informations sont justes, la rue Vermenouze en accueillait 2000 avant la fermeture de la rue de la Coste.

Oui mais ça va coûter cher ! En effet, il est nécessaire de reprendre complètement l'écoulement des eaux pluviales pour installer un caniveau central. Mais la désertification de la rue, ça coûte combien aux finances municipales ?

Oui mais le centre ville serait inaccessible pendant la durée des travaux. La circulation dans les autres rues qui mènent au centre pourrait être provisoirement modifiée.

D'autres objections pourront certainement être soulevées mais deux objectifs devraient guider les élus et services techniques : la sécurité des usagers les plus vulnérables, piétons et cyclistes et le bien vivre en centre ville. La zone de rencontre, créée par décret modifiant le Code de la Route le 30 juillet 2008, répond à ces deux objectifs. Reste à l'utiliser convenablement.

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